Défiscalisation des heures Supplementaires, la Fable De Lefebvre...

Devant les sénateurs, le secrétaire d’Etat au commerce et aux PME assure que la France compte des entreprises qui gagnent, notamment grâce aux dispositifs mis en place dans l’innovation.

[AU SÉNAT] : Extrait de la Séance du 14 Décembre 2011

M. Frédéric Lefebvre : J’ai rencontré, voilà quelques jours, un ébéniste, qui, alerté par des rumeurs de suppression de l’exonération des heures supplémentaires, m’a instamment demandé, devant ses ouvriers et un certain nombre d’élus, de gauche comme de droite, de ne pas supprimer ce dispositif, qui lui permet de faire face, le cas échéant, à un surcroît de demandes, et ainsi de tirer la croissance de son entreprise [ ... ]

M. Jean-Pierre Caffet : Mes chers collègues, nous connaissions tous la fable Le Savetier et le financier. Grâce à M. le secrétaire d’État, l’œuvre de La Fontaine s’enrichit d’une nouvelle fable : Le Financier et l’ébéniste. (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.) Dans cette fable, les heures supplémentaires réalisées par l’ébéniste procurent spontanément de la croissance pour le financier et sont donc créatrices d’emplois.

Or, tout le monde le sait, il n’en est rien. En fait, vous commettez une erreur de raisonnement, monsieur le secrétaire d’État. Vous considérez que l’heure supplémentaire crée de l’emploi ou de la croissance. Mais ce qui crée de la croissance et, éventuellement, de l’emploi – en effet, il peut y avoir croissance sans création d’emplois –, c’est seulement la demande qui est adressée à l’entreprise.

[ ... ] Soutenir que l’heure supplémentaire a, par définition, la vertu fantastique de créer de la croissance et de l’emploi relève de l’absurde ou de la fable.

Comme l’a rappelé notre collègue Edmond Hervé, l’effet des heures supplémentaires sur la croissance du PIB est de 3 milliards d’euros, pour un coût plus proche, selon moi, de 4,9 milliards que de 4,4 milliards d’euros, mais tel est bien l’ordre de grandeur.

Ces chiffres ne sont pas tirés de n’importe quel document, ils ne sont pas une invention du parti socialiste : ils figurent dans un rapport du Gouvernement au Parlement.

En d’autres termes, dans un rapport qu’il a remis au Parlement, le Gouvernement a écrit noir sur blanc que la défiscalisation des heures supplémentaires coûtait près de 5 milliards d’euros pour un surcroît de croissance de 3 milliards d’euros. Il est regrettable qu’il n’en tienne pas compte.

Néanmoins, cette défiscalisation provoque aussi un effet d’aubaine, même s’il est largement nié. Entre avril 2007 et avril 2008, le nombre des heures supplémentaires a augmenté de 34 %, alors même que nous connaissions déjà un ralentissement de la croissance. Si ce n’est pas un effet d’aubaine, expliquez-moi ce que c’est !

Monsieur Delattre, cet effet d’aubaine ne profite pas aux salariés, qui n’en peuvent mais et qui sont obligés d’accepter de faire les heures supplémentaires demandées par leur employeur. (Protestations sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)

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